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Quelque jours à Saint Vaast, textes de Pascale

Portraits de maisons de famille

On va dire que j’en ai eu quatre.

La première m’a fait désirer toutes les autres. Elle s’appelait l’Alouette et se trouvait en Indre-et-Loire près de Tours. Achetée par mes parents dans les années 1947-1950, elle fut véritablement mon premier contact avec la vraie Nature et un déchirement lorsqu’ils l’ont revendue quelques années plus tard.

La deuxième se trouvait à Châtenay dans la Beauce. Nous l’avons gardée très peu de temps, dans les années 1970,  mais elle était « notre » campagne. Petite maison de village avec un beau jardin en face de l’église et mitoyenne de l’école du village. Les enfants et mon premier doberman, Isly, s’y ébattaient avec joie. Un superbe cerisier nous donnait de grosses cerises noires pulpeuses et juteuses. Nous faisions d’interminables promenades à pied ou en vélo dans les champs, je prenais des bains de soleil à l’abri des regards dans le verger pendant que les garçons faisaient des steaks hachés avec de la terre en imitant le boucher qui passait une fois par semaine avec son camion. Tout n’était que joies simples mais de courte durée puisqu’il a fallu la vendre rapidement. Deuxième déchirement.

La troisième se nommait La Bûcherie à Saint-Molf non loin de Guérande en Loire-Atlantique. Nous l’avions louée dans les années 1978-1980  pour nous échapper de la foule des estivants de La Baule. Oui, ce fut une vraie maison de famille réunissant pendant les vacances enfants et leurs copains et cousins. Vieille maison au toit de chaume, sans grand confort, ancien restaurant à la mode des années 1960 tombé dans l’oubli. Cette maison avait un charme incontestable avec une grande cheminée où tout le monde était libre de vivre comme il l’entendait ; plage dans la journée, la plage de Penbron n’était pas loin, et grillades au feu de bois le soir pour se retrouver tous ensemble. Il a  fallu encore s’en séparer.

Enfin, la quatrième se nomme Passe-Rose, nom des roses trémières qui dépassent toutes les autres. Elle se trouve dans le Perche (Orne) près de Bellême. Elle est la réalisation de tous mes rêves de campagne depuis mon enfance, et puis c’est la mienne ! Maison de famille, ce sont mes enfants eux-mêmes qui l’ont nommée ainsi. Achetée en 2001 avec Jacques, elle a vu grandir mes petits-enfants et continue à me combler de joie avec mes deux chats, Milord et Milady. Elle est aussi une maison de charme avec une âme. Elle est un refuge loin des embouteillages polluants parisiens. Elle est l’espace et le calme dont j’ai besoin pour me ressourcer et écrire. Les enfants viennent un peu moins, c’est normal, mais les souvenirs continuent à se construire les uns après les autres. A Pâques, ils étaient là et je leur ai donné mon livre « Histoire de ma vie ». L’émotion était à son comble. Les amis aiment bien aussi venir à Passe-Rose, ils ne sont pas insensibles au charme et à la sérénité qui s’en dégagent ; quant à moi, j’y goûte une solitude de rêve toujours habitée par le souvenir de Jacques.

Pascale G

Les habitudes

Je n’aime pas les habitudes ni les routines  qui peuvent être cousines et pourtant je les collectionne sûrement comme tout le monde.

Il existe plusieurs habitudes, celles que l’on s’impose et celles qui vous sont imposées. Elles finissent par faire partie de nous parce qu’elles rythment notre vie et qu’elles nous rassurent quelque part. Jusque- là tout va bien, le danger commence à poindre si ces habitudes ou ces routines finissent par donner un sens à notre vie, au point que si, pour une raison ou pour une autre, elles disparaissent, nous ayons l’impression que notre vie n’a plus de sens.

Et puis, il y a les bonnes et les mauvaises habitudes auxquelles nous sommes tout autant attachés.

Mais, puisque de toutes les façons, les habitudes font partie de notre vie, alors acceptons-les avec bonne humeur, mais ce qui est intéressant, c’est de voir si l’on est capable de les changer et si on en a seulement envie.

Changer les habitudes, ne serait-ce pas tout simplement changer de vie, serait-ce aussi important que cela ? Car l’habitude ou sa cousine la routine nous immobilise dans ce que nous sommes ou essayons d’être. Elle nous empêche d’avancer et de nous dépasser au risque de nous faire stagner dans un état que croyons confortable mais qui nous visse à une régularité pesante dont nous pensons avoir besoin pour l’équilibre de notre vie.

Mais les habitudes ne se jugent pas et ne se raisonnent pas, elles font partie de nos vies qu’on le veuille ou non. Tentons simplement de ne pas en dépendre complètement et allégeons notre quotidien en en bannissant quelques- unes pour respirer autrement, être disponible à la  nouveauté, et prendre de nouvelles habitudes ! Puisqu’elles semblent indispensables à la bonne marche de notre vie, ayons au moins la fantaisie de les renouveler de temps en temps. 

Pascale G.

l’ennui

« L’ennui », à ne pas confondre avec « les ennuis », toutes ces choses pas très agréables qui vous arrivent au cours de notre vie.

Non, l’ennui est un état d’esprit bien particulier, une langueur psychique, un abandon, un désintérêt ou un refus et déjà un lâcher-prise. Il se manifeste, à notre insu, de différentes façons. Il mène notre vie alors que nous avons l’impression contraire que justement elle n’est menée par rien. Serait-ce un certain laisser-aller ? Avec l’ennui, l’envie et le désir s’échappent et les projets s’étiolent.

Comment arrive l’ennui ? L’esprit inoccupé provoque l’ennui, l’enfermement, le manque de liberté débouchent à la longue sur l’ennui.

L’ennui s’imposerait-il de lui-même ? Le malade cloué sur son lit d’hôpital, il ne souffre pas spécialement mais il n’a rien à faire, donc il s’ennuie.

Le prisonnier, dans sa cellule, trouve les journées longues, il s’ennuie.

Le vieillard, seul dans sa maison, attend que le temps passe, il ne fait rien parce qu’il n’a plus rien à faire et n’a plus le désir ni la force de faire, il s’ennuie.

La mère de famille, coincée avec ses enfants chez elle, fait connaissance à un moment ou à un autre avec l’ennui.

La solitude non désirée débouche forcément sur l’ennui.

Il y a donc plusieurs sortes d’ennuis, mais elles ont toutes le même habillage, celui du temps où il ne se passe rien. Nous avons, par conséquent, un besoin impératif d’activité physique et intellectuelle afin d’éloigner, de narguer, de tromper cet ennui qui nous guette tous au moment où nous nous y attendons le moins.

Sommes-nous responsables de cet ennui ? Oui et non. Ce qui importe, c’est essayer de le prévoir et de l’assumer quand il advient. L’ennui ressemble aux sables mouvants qui nous absorbent, nous engouffrent et nous étouffent. Alors, tentons de ne pas nous aventurer dans ces régions instables où l’esprit chavire.

Pascale G.

L’annexe des Bourdonnais

L’annexe des Bourdonnais est un débarras de 6 à 7 m2 à peu près. Il se trouve sur le même palier que mon appartement. J’ai squatté ce lieu pendant des années. Il semblait n’appartenir à personne. Il était sale, poussiéreux et avait dû servir de réserve de charbon mais le plafond assez bas avait des poutres comme dans mon appartement. Pas de fenêtre et pas d’électricité. J’y rangeais du bois, du vin, des valises et des choses inutiles.

Un jour, j’appris qu’il ne faisait pas partie des parties communes de l’immeuble mais d’un lot que venait d’acquérir une société. Celle-ci n’était pas intéressée par ce débarras et le mettait en vente. Très judicieusement, elle me le proposa d’abord à moi étant donné que mon appartement était sur le même palier et que je l’occupais déjà d’une façon quelque peu illicite. Je sautais sur l’occasion au grand dam d’un autre copropriétaire également intéressé. Achat conclu. J’y fais des travaux d’assainissement et d’aménagement : sol, peinture.

En 2014, je commence à louer mon appartement avec Airbnb. J’entrevois éventuellement la possibilité de coucher, en dépannage, dans ce débarras que j’appelle pompeusement annexe.

J’y mets une banquette de 80 cm de large, un sac de couchage, un verrou que je peux fermer de l’intérieur, une petite table, un miroir, deux torches électriques, un seau hygiénique avec litière de chat dans un sac plastique, des lingettes pour une toilette de chat et des bouteilles d’eau. C’est royal !  J’y ai couché effectivement quelquefois « incognito ». Oui « incognito » car je ne tenais pas à ce que mes voyageurs ou les autres habitants de l’immeuble me voient entrer ou sortir de mon annexe-débarras.

Je me souviens de la première nuit avec une impression d’enfermement dans un noir total, écoutant les bruits de l’escalier : ascenseur, écoulement d’eau dans les tuyaux, les gens qui dévalent l’escalier. Et le lendemain matin, mes ruses de sioux pour sortir de mon antre sans être vue.

Et s’il m’arrivait quelque chose pendant la nuit, enfermée dans ce débarras ? Le gardien a donc la clé et mon numéro de portable. On ne sait jamais…

Cette petite aventure a dû avoir lieu 3 ou 4 fois mais j’essaie de ne pas trop la renouveler. Ce n’est pas très confortable bien que beaucoup de gens s’en contenteraient plutôt que de coucher dehors. Et puis elle est la preuve de mes capacités d’adaptation ce qui n’est pas négatif ! 

Pascale G.

                      

une lettre littéraire

Très chère Amie,

Du Cotentin je vous écris. Mon stage d’écriture se termine et je vais regagner ma campagne dans la journée.

Je viens de passer trois jours très intenses durant lesquels j’ai recueilli beaucoup de choses. D’abord le partage avec les autres de nos propres écrits reflétant ce que nous sommes avec authenticité. Ce partage était aussi celui de l’amitié et de la gaieté car nous étions bien ensemble.

La nature, la vraie, et Sybille, notre maître d’écriture nous ont permis d’aller plus loin en nous-même et d’en extraire des réflexions que nous n’aurions pas imaginé avant de venir ici.

Quant à moi, vous connaissez mon projet personnel, je puis vous assurer que j’ai engrangé de belles choses, elles vont nourrir abondamment mon ouvrage en cours.

Ces ateliers et ces stages d’écriture sont, à chaque fois, des expériences personnelles très denses parce que justement elles se passent avec d’autres personnes très différentes, et cette différence fait la richesse de ce que nous vivons ensemble.

Pour moi, une des caractéristiques de ces moments est l’étonnement. Oui, très chère, nous nous étonnons nous-même et mutuellement. N’est-ce pas étrange et gratifiant ? Qu’en pensez-vous ?

J’espère vous revoir bientôt afin que nous parlions de tout cela posément. Je vous lirai quelques textes, vous savez que votre avis compte énormément pour moi.

Je vous téléphone à mon retour et vous  assure de ma profonde amitié.

Pascale

Tag(s) : #Pascale G, #Textes de participants, #cotentin 2019
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