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Les chemins de Pascale
Les chemins de PascaleLes chemins de Pascale

Le sentier du Nick

Saint-Lunaire le 13 juin 2017.

Thème : décrire la promenade du matin d’après le livre de Sylvain Tesson « Sur les chemins noirs ».

Promenade du matin sur le sentier escarpé du Nick où la lumière transparente joue avec les vaguelettes du Goulet.

La montée pierreuse et tortueuse est récompensée par la vue surplombante d’une mer scintillante contrastant avec la lumière blonde du sable de la plage.

Un plan d’eau s’étale paresseusement avec des reflets turquoise émaillés de petites voiles jaunes.

Longé le sentier plongeant sur la mer pour surprendre de petites criques vierges et solitaires au sable doré et non foulé sûrement renouvelé à chaque marée. Plus loin, découvert la lumière blanche de la mer agitée sur les rochers.

En quittant la mer pour prendre le sentier de terre, impression de pénétrer dans une jungle à peine apprivoisée. Trouvé deux lumières différentes, l’une tamisée par la végétation et l’autre grisée du granit et de l’ardoise confondus de Saint-Lunaire au loin.

 

Fragments

Promenade en bateau sur la Rance entre Dinard et Dinan.

Départ – que le trajet soit long ou court, c’est toujours important le départ, c’est un au revoir ou un adieu, on ne sait jamais.

 

La vierge de Piseux qui signifie « entre deux rives », elle en a les bras tendus d’une rive à l’autre.

 

Le barrage de la Rance. La grande porte est lourde, impressionnante et rouge. Quand le pont se lève pour laisser passer les bateaux et se rebaisse ensuite, les signes de sympathie circulent entre les navigateurs et les spectateurs, c’est comme un spectacle. On passe de l’estuaire au fleuve mais c’est encore de l’eau salée.

 

Le scintillement. Mer ou Rance, Rance ou mer, l’eau scintille. Une mouvance argentée vient à notre rencontre, on ne sait plus si on navigue sur la mer ou sur le fleuve, peu importe on s’évade et le temps change de rythme comme sur le Douro au Portugal.

 

L’eau, après avoir été claire et salée est devenue saumâtre et boueuse. Après l’écluse du Chatellier, elle est redevenue claire et n’est plus salée, c’est vraiment le fleuve.

 

Les berges sont tantôt sauvages et tantôt civilisées, d’immenses roseaux se superposent avec une végétation aquatique luxuriante.

 

Le ciel ne se reflète pas dans l’eau mais  toute la verdure environnante. Deux paysages se superposent et se chevauchent.

 

Huîtres n°4 très fraîches dégustées sur le port de Dinan avec un verre de Chardonnay bien frais, voilà un petit moment d’exception du temps présent apprécié avidement.

 

Re - départ pour le retour. Bruit du moteur ronronnant, régulier, qui rassure en berçant ou agace à la longue.

D'un paysage à un autre – Bretagne et Portugal

Impressions et sensations de contrastes entre les paysages de Saint-Lunaire et ceux du fleuve Douro au Portugal. La mer et le fleuve.

La mer avec ses vagues, ses marées, sa faune et sa flore. Le fleuve avec ses courants, ses écluses et ses berges aux pentes abruptes où la végétation a été recréée par l’homme obligé de construire des terrasses pour planter la vigne et les oliviers. C’est une nature aménagée et bien rangée alors que les bords de mer peuvent encore rester sauvages avec les plages, les dunes, les landes et les falaises.

Les écluses sont encore une construction de l’homme destinée à gérer la navigation. Celle de 36 mètres de hauteur est vertigineuse ; on a l’impression de descendre au centre de la terre dans un décor wagnérien avec une mise en scène digne des Niebelungen pour la Tétralogie.

La navigation sur mer est tout de même plus aventureuse avec la houle et les tempêtes, certes le paysage défile aussi à droite, à gauche, devant et derrière mais il n’est qu’espace illimité, tandis que le fleuve est déterminé, encadré, si je puis dire, par ses rives avec un paysage plus imprévu et renouvelé, une nature sauvage ou cultivée et habitée.

Les teintes sont différentes aussi, la mer reflète le ciel en passant des gris aux bleus ; le fleuve reflète les verts des rives qu’il longe, il ondule au gré du sol qu’il traverse avec des méandres et des lignes droites que les bateaux doivent respecter. En mer, seul le navigateur décide librement de la direction à prendre en respectant toutefois certaines règles.

La faune est bien évidemment différente. Ce sont les mouettes et les goélands qui traversent les ciels maritimes, quant aux habitants sous- marins, ils sont multiples. Les volatiles du fleuve sont ceux de la terre bien que quelques mouettes s’y joignent ; les poules d’eau, les hérons, les grues, les canards et les cygnes y séjournent fréquemment et les nids de cigognes ne sont pas loin.

Je pense que la navigation maritime ou fluviale engendre la même impression d’évasion et dépaysement parce qu’ une certaine notion du temps disparaît ; on n’est pas dans le même temps  sur terre et sur l’eau parce que l’espace a remplacé le lieu fixe et cela ne correspond plus à nos critères de vie sédentaire ; le temps passe « autrement », ce n’est qu’une impression bien sûr mais c’est elle qui crée le dépaysement et l’évasion. Le corps est transporté et imagine qu’il bouge comme ce qui l’entoure et c’est faux, alors l’esprit peut se libérer et atteindre un monde différent lui permettant de se dépasser et d’aller plus loin dans sa réalisation, c’est bien pour cela que nous existons n’est-ce-pas ?!

 

Rencontre avec soi-même

Dans les années 2000, c’est bien une rencontre avec moi-même à travers les autres qui s’est produite lorsque j’ai été bénévole dans l’Unité de Soins Palliatifs de l’Hôpital Paul Brousse. Je ne dirai pas que c’est à mon insu car je l’ai provoqué en décidant de faire ce bénévolat, mais je ne savais pas du tout ce qui allait m’arriver.

C’est en entrant dans chaque chambre lorsque le contact était possible que je me suis découverte en réalisant tout ce que je pouvais donner et recevoir de la personne qui était alitée et qui acceptait que je passe un moment avec elle. C’était une écoute musicale, un échange de regard, une pression de la main, un sourire, quelques mots balbutiés, une promenade dans le jardin, une cigarette fumée ensemble, des crêpes que je faisais pour la Chandeleur leur rappelant le bon vieux temps. C’était aussi un échange et un partage avec les familles autour d’un petit café, ces familles exténuées par l’angoisse et le chagrin qui monopolisaient leur vie de chaque jour. C’était cette volonté que j’avais en moi, partagée par l’équipe de médecins et d’infirmières, de faire de cette Unité avant tout un lieu de vie jusqu’au bout. Pour ce faire, contrat avec un fleuriste afin qu’il y ait chaque semaine un gros bouquet de fleurs fraîches pour égayer le hall d’accueil ainsi que des affiches d’expositions parisiennes fournies gracieusement par les musées nationaux. J’organisais également des petits concerts de jeunes musiciens dans le hall pour les malades et leurs familles.

Oui, j’ai découvert un autre moi que je ne connaissais pas, il était enfoui au plus profond de mon être et avait besoin, semble-t-il, de remonter à la surface, c’était celui de l’empathie. Il m’a procuré les plus grandes satisfactions humaines que j’ai pu avoir dans ma vie parce qu’il m’a entraînée vers les autres, et pas n’importe lesquels : ceux qui allaient partir.  

                                                                                                                                                  

Sur la route...

Dans les années 1950, souvenir d’un voyage avec mes parents en Italie pendant les vacances de Pâques.

C’était Florence avec ses collines, ses places aux fontaines fleuries, le Ponte Vecchio avec ses bijoutiers.

C’était Florence avec ses églises de pierre ocrée ou de marbre noir et blanc.

C’était Florence avec le beau David sculpté dans sa parfaite nudité.

C’était Florence avec les Uffisi arpentés pendant des heures et des heures inlassablement jusqu’à la saturation et une immense fatigue, mais je me souviens encore de cette impression de privilège que j’ai ressenti de pouvoir admirer « la naissance de Vénus » de Botticcelli, j’étais subjuguée par sa beauté parfaite.

C’était Florence avec ces italiens qui me séduisaient tant à l’aube de mes 18 ans avec leurs cheveux noirs, leurs yeux de braise, leur profil racé et leur sourire charmeur. Que d’œillades échangées dans les rues, les églises, les restaurants, mes parents n’étaient pas dupes et ils montaient la garde !

Mais c’était Florence dans les années 1950 et je n’avais pas encore mes 18 ans !

 

Toujours sur la route….

Ligne de partage entre le passé et l’avenir.

Par une journée de beau temps, l’avion que l’on regarde dans les hauteurs bleues semble partager le ciel en deux avec une traînée blanche qu’il laisse derrière lui. J’ai toujours été fascinée par cette vision éphémère car l’avion s’éloigne très vite pour disparaître complètement et la traînée blanche s’évanouit dans l’éther pour n’être plus qu’un mirage oublié.

Pour moi, cela représente mon destin que je ne connais pas mais vers lequel je suis projetée avec une force et une puissance contre lesquelles je n’ai même pas envie de lutter, c’est un élan qui me pousse et me porte et j’y vais avec confiance.

La fumée blanche qui s’estompe derrière l’avion c’est le passé consumé presque déjà oublié mais qui a sûrement servi à construire l’après qui est devant et vers lequel je m’élance sans résistance et avec joie.

Dans cet élan vers l’inconnu, il y a peut-être une soif de liberté que je n’avais pas encore trouvée lors de ma prise de conscience de cette vision aérienne, mais maintenant que je l’ai trouvée, j’en suis d’autant plus persuadée et je suis le chemin du cours de ma vie.

Après une lecture de « Nuit de prince » de J.Kessel, la nostalgie du voyageur...

Et si la nostalgie servait de témoignage pour les générations futures. Toutes ces choses que nous avons connues et qui n’existent plus que dans les livres et les mémoires.

Si j’écris mon « Histoire de vie » c’est pour que mes enfants et petits- enfants me connaissent et me comprennent mieux bien sûr mais aussi pour qu’ils aient un témoignage d’une époque que j’ai vécue et qu’ils ne connaissent pas.

En 1945, les bougnats (auvergnats venus à Paris) livraient les sacs de charbon avec des voitures à chevaux pour que les parisiens puissent se chauffer. Pour le lait, c’était la même chose.

 Les rémouleurs passaient et criaient dans les rues pour aiguiser les couteaux. Les vitriers faisaient la même chose pour remplacer les vitres cassées.

 L’éclairage des rues de Paris était au gaz avant d’être électrique ; tous les soirs, à la même heure, les allumeurs de réverbères passaient pour allumer les becs de gaz et revenaient les éteindre au matin.

 Il n’y avait pas encore de réfrigérateurs ou Frigidaire qui était une marque de l’époque, et encore moins de congélateurs. Il y avait des glacières contenant les pains de glace livrés dans les immeubles avec des voitures à chevaux ; les hommes portaient ces énormes pains de glace avec un sac de jute placé sur leurs épaules.

 Il n’y avait ni lave-vaisselle ni lave-linge et encore moins de sèche-linge. Le linge était lavé et battu dans les lavoirs à la campagne en plein air ou dans l’évier dans les villes, on le faisait bouillir dans une lessiveuse sur une cuisinière fonctionnant au bois et au charbon.

Dans les rues et les cours d’immeuble, des musiciens que l’on appelait « violoneux » parce qu’ils jouaient du violon en général, passaient, ils jouaient un petit air et on leur lançait une pièce pour qu’ils s’en aillent.

C’était Paris après la guerre.

 

Une nuit parfumée

Une nuit à Passe-Rose en juillet pendant les moissons.

La journée avait été torride, le thermomètre avait frôlé les 40°. L’air était très sec, pas un souffle. Les moissonneuses avaient travaillé jusqu’à minuit. Les volets avaient été clos tout le jour pour maintenir la fraîcheur dans la maison qui sentait encore le feu de bois des flambées antérieures. La mare était étale, les poissons envasés tout au fond, et le niveau d’eau baissait de jour en jour. Les papillons blancs de beau temps batifolaient joyeusement, mais les oiseaux se taisaient dans la torpeur stagnante, seuls les grillons étaient actifs et on se serait cru en Provence. Les chats n’étaient pas sortis de la journée allongés pesamment sur les tomettes restées fraîches. Tout le monde semblait vivre au ralenti dans l’attente inespérée d’une fraîcheur nocturne.

On attendait, on attendait quoi au juste….

On n’avait pas envie d’aller se coucher. On attendait !

Nous étions sous l’auvent, la nuit était bien installée et les étoiles scintillaient dans une voie lactée des grands soirs d’été où l’on fait des vœux fous au passage des étoiles filantes. Ce soir-là il n’y en avait pas ! La fumée de nos cigares s’étirait dans une lenteur presque immobile et nous rajoutions régulièrement des glaçons dans nos whiskies qui devenaient d’une platitude aquatique.

Puis, brusquement, survint imperceptiblement une petite brise enjôleuse frôlant nos peaux tièdes et moites. Cette brise n’était pas seule, elle était chargée d’une odeur enivrante de blés coupés et de paille surchauffée au soleil. C’était doux et fort à la fois. Nous étions envahis, presque submergés par cette odeur.

C’était sans doute elle que nous attendions, cette nuit étoilée et parfumée dominée par cette brise qui parvenait enfin à être simplement fraîche.

Les attentes

Après lecture de « La route bleue » de Kenneth White

J’ai vécu les attentes incertaines et déçues.

J’ai vécu les attentes aléatoires et récompensées.

J’ai vécu les attentes des voyages sans but.

J’ai vécu le temps des rendez-vous manqués et de leur impossibilité.

J’ai vécu le temps des rendez-vous annulés au dernier moment avec une pointe de tristesse filtrée de colère.

J’ai vécu les attentes des rendez-vous en retard où le temps ne passe plus.

J’ai vécu le temps des rendez-vous en avance, lorsque surprise ! J’apercevais sa voiture argentée et il m’attendait, j’avais un spasme de joie dans le ventre.

J’ai vécu à chaque fois l’ivresse des retrouvailles. D’un seul coup, les angoisses de l’attente, les souffrances de la séparation s’évanouissaient comme par enchantement et la réalité du présent de nos présences seule existait.

Il y en eut des attentes et des retrouvailles, jamais les mêmes, toujours renouvelées ; elles furent courtes ou longues mais elles surent inventer à chaque fois le sel de ma vie.

 

Je n’irai pas parce que je n’irai plus.

après « Feu nomade » de Gérard Chaliand.

Il était une petite maison de Blanche Neige dite « La Bûcherie » cachée dans les marais entre Guérande et Herbignac. C’était ma bouffée de campagne, de silence et de solitude en comparaison de La Baule envahie durant les mois d’été. Les enfants faisaient des expéditions aventureuses et mystérieuses dans les marais, nous allions à la plage de Pen-Bron, côté nudiste, avec un léger pique-nique composé de fruits et de tomates que l’on trempait dans l’eau de mer pour les assaisonner de sel. On revenait le soir grisés et grillés, aveuglés par le soleil,  la peau tendue par le sel des baignades répétées, et le soir, tout le monde se retrouvait autour des grillades dans la cheminée avec les pommes de terre dans la cendre. Chacune et chacun racontaient sa journée en regardant les flammes bleues ou orangées s’échapper dans l’âtre avec des étincelles. On écoutait de la musique aussi, les paupières alourdies des saines fatigues accumulées dans la journée : le grand air, le soleil, les bains de mer, les marches pour atteindre la plage, le sport pour certains. Le jardin était frais et calme avec les odeurs de soir d’été, on s’en pénétrait avant d’aller sombrer dans un sommeil profond et récupérateur de vacances bien occupées. Vacances saines de campagne et de mer, une association délicieuse que j’aimais.

Les années sont passées. La Bûcherie a quitté nos vies ou plutôt c’est nous qui l’avons quittée.

Je n’irai pas ou je n’irai plus à La Bûcherie parce qu’elle a été démolie.

C’était une belle parenthèse de vie qui a duré le temps qu’il fallait pour devenir un souvenir de sensations, d’émotions et de bonheur inoubliables.

 

Pascale Grilliat

 

Tag(s) : #Atelier d'écriture, #Textes de participants, #Pascale G
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